Dans le monde des soins de santé, une question éthique persistante se pose : comment devrions-nous aborder la fin de la vie ? Les professionnels de la santé sont-ils là pour prolonger la vie à tout prix, ou leur rôle est-il d’assurer une fin de vie digne et sans douleur ? C’est un débat qui divise, et qui est au cœur de l’approche palliative de la fin de vie.
Les Soignants : Un Débat Divisé Sur L’approche Palliative De La Fin De Vie
Les résultats d’une convention soignante organisée par la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) révèlent un attachement profond des professionnels de santé à l’approche palliative de la fin de vie. Cette approche, qui vise à soulager la douleur et à améliorer la qualité de vie des personnes en fin de vie, est au cœur de leur pratique.
Cependant, cette approche est mise à l’épreuve par le débat sur l’aide active à mourir, dont la légalisation semble se profiler. Les soignants, malgré leurs réticences ou leur opposition à cette pratique, espèrent que des limites seront établies et que leur expérience sera prise en compte.
La SFAP a mobilisé ses membres pour recueillir leurs opinions sur ce qu’ils considèrent comme acceptable et inacceptable. Environ 130 équipes, représentant près de 5000 personnes, ont participé à cette réflexion. Parmi elles, on compte entre 200 et 250 infirmiers et 120 à 150 aides-soignants.
Sept messages clés ont émergé de cette convention. Le premier, “donner la mort n’est pas un soin“, est un message fort qui reflète l’opinion majoritaire des participants. Pour eux, le suicide assisté est incompatible avec les soins palliatifs. Si cette pratique était légalisée, ils estiment qu’il ne devrait pas revenir aux soignants de la mettre en œuvre.
Le deuxième message clé, “continuer à accompagner le patient quoi qu’il arrive“, est un pilier des soins palliatifs. Les soignants s’engagent à ne pas abandonner le patient, même face à une demande d’aide à mourir. Cependant, certains ont déclaré qu’ils s’arrêteraient en cas d’euthanasie.
Le troisième message, “préserver les plus vulnérables“, exprime l’inquiétude des soignants face aux demandes d’aide active à mourir qui pourraient émaner de personnes se sentant comme un fardeau pour leurs proches ou la société. Ils appellent à redonner une place dans la société aux personnes âgées, malades ou handicapées.
Les positions des soignants sont nuancées. Si une petite minorité est plus favorable à l’aide à mourir, la majorité exprime le souhait de prendre en compte les situations particulières de souffrance et de détresse. Ils appellent à une meilleure formation des soignants et à un développement des soins palliatifs.
Le dernier message clé, “prendre soin du vécu des soignants“, souligne l’impact psychologique sur les soignants de participerà un acte d’aide active à mourir. Participer à un tel acte peut être d’une violence extrême pour les soignants.
Ces résultats ont permis à la SFAP de mieux comprendre l’état d’esprit des professionnels de la filière. Ils serviront également à accompagner les équipes dans leur réflexion sur l’évolution probable de la loi.
L’Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie : un éclairage sur la situation en France
La 3ème édition de l’Atlas national des soins palliatifs et de la fin de vie, publiée par le Centre national Fin de vie – Soins palliatifs, offre un aperçu précieux de la situation actuelle en France. Cette édition, qui arrive à un moment où la fin de vie est au cœur du débat public, se distingue par son interactivité, avec une version numérique proposée en collaboration avec AtlaSanté.
En France, la population vieillit, avec 10 % de personnes âgées de 75 ans ou plus. L’espérance de vie des Français a considérablement augmenté (85,1 ans pour les femmes et 79,1 ans pour les hommes), mais l’augmentation du nombre de personnes atteignant des âges de mortalité potentielle entraîne une augmentation du nombre de décès annuels (619 000 décès en 2019). Les personnes âgées de 75 ans ou plus représentent près de 30 % des décès en 2019.
La majorité des Français décèdent à l’hôpital (53 %). Cependant, cette part diminue depuis 10 ans (-5 %) et un quart des décès ont lieu en Ehpad. Les cancers (28 %) ou les maladies cardio-vasculaires (24 %) représentent plus de la moitié des causes de mortalité en France.
La France dispose d’une offre de soins qui répond aux besoins des patients, quel que soit le lieu de prise en charge. Il y a 171 Unités de Soins Palliatifs (USP) avec 1980 lits et 5 566 Lits Identifiés Soins Palliatifs (LISP) répartis sur 904 établissements en France. 420 Équipes Mobiles de Soins Palliatifs (EMSP) et 23 Équipes Régionales de Référence en Soins Palliatifs Pédiatriques (ERRSPP) complètent cette offre. L’Hospitalisation à Domicile (HAD), qui consacre un tiers de son activité aux soins palliatifs, intervient pour prendre en charge les patients les plus complexes. Même si 21 départements n’ont pas d’USP, tous les territoires disposent de structures de prise en charge palliative.
La formation en soins palliatifs en France : un enjeu majeur
La formation en soins palliatifs est un aspect crucial de la prise en charge de la fin de vie. En France, la formation permanente en soins palliatifs est possible grâce à deux parcours universitaires : le Diplôme Universitaire de Soins Palliatifs (DUSP) et le Diplôme Inter-Universitaire de Soins Palliatifs (DIUSP).
Le DUSP est une formation initiale qui aborde les différentes facettes de la pratique des soins palliatifs, notamment les compétences cliniques, techniques, relationnelles, psychiques et éthiques. Cette formation, qui comprend une année de cours, un examen écrit, un stage et la rédaction d’un mémoire, est ouverte à une large gamme de professionnels de la santé et du social, y compris les médecins, les infirmières, les kinésithérapeutes, les psychologues, les aides-soignantes, les travailleurs sociaux, les aumôniers et les accompagnants bénévoles.
Le DIUSP, qui suit la réussite des examens de la première année du DUSP, est une année complémentaire de formation clinique et critique. Chaque faculté met en œuvre cette formation avec ses propres spécificités, en cohérence avec les recommandations du Collège National des Enseignants pour la Formation Universitaire en Soins Palliatifs (CNEFUSP). Cette formation vise à approfondir la compétence technique, relationnelle et éthique dans l’accompagnement, le soin et les traitements des patients atteints d’une maladie létale évolutive. Elle encourage également la réflexion sur l’accompagnement, le soin et les traitements de ces patients, ainsi que la discussion dans le cadre de la pluriprofessionalité. Enfin, elle ouvre à la réflexion éthique autour des thèmes touchant les rapports entre médecine, techniques, société, souffrance et mort.
Ces formations sont essentielles pour garantir une prise en charge de qualité des patients en fin de vie. Elles permettent aux professionnels de la santé d’acquérir les compétences nécessaires pour répondre aux besoins spécifiques de ces patients et pour naviguer dans les défis éthiques et relationnels que pose la fin de vie. En formant des professionnels compétents et sensibles aux enjeux des soins palliatifs, nous pouvons nous assurer que chaque patient reçoit les soins dont il a besoin et mérite à la fin de sa vie.
