La relation entre les familles et les équipes soignantes constitue un pilier essentiel de la qualité de vie en EHPAD. Pourtant, les incompréhensions, les non-dits et le manque de temps fragilisent régulièrement ce lien. Résultat : insatisfaction, conflits et épuisement de part et d’autre. Bonne nouvelle : avec une méthode structurée en trois étapes claires, vous pouvez transformer durablement cette relation et en faire un véritable atout pour votre établissement.
Sommaire
Pourquoi la relation famille–soignant mérite toute votre attention
Dans le quotidien d’un EHPAD, la relation avec les familles est souvent reléguée au second plan, faute de temps ou de méthode. Pourtant, elle influence directement la satisfaction globale, le climat de travail et même la réputation de votre établissement.
Les familles vivent un deuil blanc : celui de voir leur proche perdre peu à peu son autonomie. Cette souffrance psychologique génère de l’anxiété, parfois de la culpabilité, qui peut se manifester par de l’agressivité ou des exigences disproportionnées. De leur côté, les soignants se sentent parfois jugés, incompris, voire attaqués dans leur professionnalisme.
Cette tension n’est pas une fatalité. Elle naît souvent d’un déficit de communication, d’une méconnaissance mutuelle et d’un manque de cadre relationnel clair. Or, une relation apaisée avec les familles facilite le travail des équipes, améliore la prise en soin et réduit considérablement les conflits.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon plusieurs enquêtes de satisfaction menées dans le secteur médico-social, plus de 60 % des insatisfactions exprimées par les familles concernent la communication, et non la qualité des soins eux-mêmes. C’est donc un levier d’amélioration majeur, accessible et à fort impact.
Les 3 étapes pour transformer la relation famille–soignant
Pour améliorer durablement cette relation, il ne suffit pas de multiplier les réunions ou d’envoyer des newsletters. Il faut structurer votre démarche autour de trois piliers complémentaires, faciles à mettre en place et adaptables à la réalité de votre établissement :
- Instaurer un cadre relationnel clair dès l’arrivée du résident
- Créer des rituels de communication réguliers et structurés
- Former les équipes à la posture relationnelle avec les familles
Chacune de ces étapes répond à un besoin précis et peut être déployée progressivement, en fonction de vos ressources. L’objectif : construire une relation de confiance, basée sur la transparence, l’écoute et le respect mutuel.
Développer les 3 étapes concrètement
1. Instaurer un cadre relationnel clair dès l’arrivée du résident
Pourquoi c’est essentiel :
Les premières semaines conditionnent toute la relation future. Si les attentes ne sont pas clarifiées dès le départ, les malentendus s’accumulent et deviennent difficiles à rattraper.
Comment faire concrètement :
Organisez un entretien d’accueil structuré avec la famille, animé par l’IDEC ou le référent du résident. Cet entretien doit couvrir plusieurs dimensions :
- Les horaires de visite et les règles de vie collective : expliquez le rythme de l’établissement, les moments propices aux visites, les espaces dédiés.
- Le rôle de chacun : clarifiez ce qui relève des soignants (soins, surveillance, accompagnement) et ce que la famille peut continuer à faire (apporter des affaires personnelles, participer aux activités, accompagner aux rendez-vous médicaux).
- Les canaux de communication : identifiez un interlocuteur privilégié côté famille et côté établissement. Précisez les modalités (téléphone, mail, rendez-vous) et les délais de réponse.
- Les valeurs et habitudes de vie du résident : recueillez des informations sur ses goûts, son histoire, ses rituels. Cela humanise la prise en soin et rassure la famille.
Exemple terrain :
L’EHPAD Les Jardins de Louise remet à chaque famille un livret d’accueil personnalisé comprenant un organigramme simplifié, les coordonnées des référents, et un calendrier des temps forts de l’année. Résultat : diminution de 40 % des appels anxieux en première semaine.
« Clarifier les règles du jeu dès le départ, c’est éviter des mois d’incompréhensions. »
Conseil d’application immédiate :
Créez ou réactualisez votre trame d’entretien d’accueil en y intégrant une rubrique « engagements mutuels ». Faites-la valider par votre comité de direction et formez vos référents à la conduire de manière bienveillante.
2. Créer des rituels de communication réguliers et structurés
Pourquoi c’est essentiel :
L’absence de nouvelles génère de l’anxiété chez les familles, qui interprètent souvent le silence comme un problème. À l’inverse, une communication régulière, même brève, rassure et prévient les tensions.
Comment faire concrètement :
Mettez en place des rituels simples, reproductibles et non chronophages :
- Le SMS hebdomadaire de l’IDEC ou du référent : un message court pour donner des nouvelles générales (« Votre maman a bien participé à l’atelier peinture cette semaine, elle était souriante »). Cela prend 2 minutes et crée un lien fort.
- La réunion trimestrielle des familles : un moment d’échange collectif sur la vie de l’établissement, les projets en cours, les nouveautés. C’est aussi l’occasion de recueillir leurs attentes.
- Le cahier de liaison numérique ou papier : un support partagé où les soignants notent des anecdotes positives, les familles peuvent poser des questions, et le référent répond. Évitez d’y consigner uniquement les incidents.
- Le rendez-vous annuel de projet de soins personnalisé : un temps dédié pour faire le point sur l’état de santé, les évolutions, les ajustements nécessaires. C’est le moment de co-construire avec la famille.
Exemple terrain :
L’EHPAD Bel Horizon a mis en place un groupe WhatsApp sécurisé par unité de vie, animé par l’AS coordinateur. Chaque semaine, une photo d’activité et un message collectif sont partagés. Les familles se sentent incluses et les demandes individuelles diminuent.
Conseil d’application immédiate :
Identifiez un rituel que vous pouvez lancer dès ce mois-ci, sans bouleverser votre organisation. Commencez petit (par exemple, un SMS bimensuel) et ajustez en fonction des retours. L’important, c’est la régularité, pas la perfection.
3. Former les équipes à la posture relationnelle avec les familles
Pourquoi c’est essentiel :
Vos soignants sont compétents techniquement, mais peu sont formés à la communication avec les familles. Or, une phrase maladroite, un ton sec ou un silence peuvent être perçus comme du mépris. Former vos équipes, c’est leur donner des clés pour désamorcer les tensions et renforcer leur légitimité.
Comment faire concrètement :
Organisez des sessions de formation courtes (2 à 3 heures) axées sur :
- L’écoute active : reformuler, valider les émotions, ne pas couper la parole.
- La gestion des émotions : reconnaître l’anxiété ou la colère de la famille sans se sentir attaqué personnellement.
- La communication non violente : exprimer les faits, ses besoins, sans jugement.
- Les techniques de désescalade : comment répondre à une famille agressive sans entrer dans le conflit.
Complétez cette formation par des analyses de pratiques régulières : lors de réunions d’équipe, prenez 20 minutes pour débriefer une situation relationnelle difficile. Qu’est-ce qui a bien fonctionné ? Qu’aurait-on pu faire différemment ?
Exemple terrain :
L’EHPAD Les Tilleuls a invité une psychologue clinicienne pour animer trois ateliers sur « La relation avec les familles en situation de vulnérabilité ». Les soignants ont témoigné se sentir plus confiants et mieux armés face aux tensions. Le nombre de signalements de conflits a chuté de moitié en six mois.
« Former, c’est donner à vos équipes la reconnaissance et les outils pour mieux vivre leur métier. »
Conseil d’application immédiate :
Inscrivez au plan de formation 2025 au moins une session dédiée à la relation famille–soignant. En attendant, diffusez des fiches réflexes (« Que dire face à une famille en colère ? ») et valorisez les bonnes pratiques en réunion.
Une astuce bonus pour aller plus loin
Au-delà des trois étapes, voici un levier puissant : impliquez les familles dans la vie de l’établissement. Proposez-leur de participer aux ateliers, aux fêtes, aux commissions menus ou à des groupes de parole. Cette implication active transforme leur regard : elles deviennent partenaires plutôt que spectatrices.
Certains EHPAD créent même des « clubs de familles bénévoles », qui co-organisent des événements ou animent des activités. Cela renforce le lien, valorise les compétences de chacun et crée une communauté solidaire autour des résidents.
Rappel des 3 étapes :
- Instaurer un cadre relationnel clair dès l’arrivée
- Créer des rituels de communication réguliers
- Former les équipes à la posture relationnelle
Ces trois piliers, simples en apparence, demandent de la constance. Mais les résultats sont à la hauteur de l’investissement : climat apaisé, équipes valorisées, familles rassurées, et résidents mieux accompagnés.
Passez à l’action dès cette semaine
Vous avez désormais une feuille de route claire pour transformer la relation avec les familles dans votre EHPAD. Ne cherchez pas la perfection immédiate : commencez par une seule étape, celle qui résonne le plus avec votre situation actuelle.
Réunissez votre équipe cadre, choisissez un premier chantier (par exemple, retravailler l’entretien d’accueil ou lancer un SMS hebdomadaire) et fixez-vous un délai de mise en œuvre. Mesurez les effets après trois mois : satisfaction des familles, nombre de conflits, ressenti des soignants.
La relation famille–soignant n’est pas un sujet annexe, c’est un levier de performance et de bien-être collectif. En y consacrant du temps et de la méthode, vous contribuez à faire de votre EHPAD un lieu de confiance, où chacun trouve sa place.
Alors, quelle sera votre première action ?
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