L’inflation galopante frappe de plein fouet les institutions les plus vulnérables de notre société, notamment les Ehpad (Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Dans le Finistère, cette situation a atteint un point critique, poussant les responsables et les élus locaux à tirer la sonnette d’alarme.
Début juillet, une quarantaine d’élus et de directeurs d’Ehpad de vingt communes du Finistère ont décidé de passer à l’action. Épuisés et désespérés, ils ont menacé de ne plus payer les factures des services publics. Pourquoi ? Parce que les dépenses de fonctionnement, notamment en énergie et en denrées alimentaires, ont mis à mal leurs trésoreries. Ajoutez à cela des difficultés de recrutement et un personnel à bout de souffle, et vous obtenez une crise majeure.
Heureusement, leur appel à l’aide n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Maël de Calan, le président du conseil départemental du Finistère, a saisi la ministre des Solidarités, Aurore Bergé. Résultat ? Près d’un million d’euros sera alloué par l’Agence Régionale de Santé (ARS) aux vingt établissements les plus en difficulté. Mais ce n’est pas tout. Le Conseil départemental du Finistère a également décidé de renforcer les trésoreries des établissements en situation financière fragile en avançant des “dotations dépendances”.
Alors, problème résolu ? Pas si vite. Si ces mesures d’urgence sont les bienvenues, elles ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Le vrai défi est de trouver des solutions structurelles à long terme. Le Département s’est engagé à revaloriser le prix de journée des Ehpad, au moins au niveau de l’inflation. Après une augmentation de 3,5 % en 2022 et de 5,5 % en 2023, une nouvelle revalorisation est prévue en janvier 2024.
Mais attention, ces mesures ne sont que des pansements sur une plaie béante. La crise des Ehpad est le reflet d’une société qui peine à prendre soin de ses aînés. Selon des données récentes, près de 30 % des Ehpad en France sont en situation financière difficile. Et ce n’est pas tout. Le secteur est également confronté à une pénurie de personnel qualifié, avec un taux de turnover atteignant parfois 40 %.
Le défi démographique : un enjeu majeur pour les Ehpad
Le défi démographique est un enjeu majeur pour les Ehpad, et il ne peut être ignoré dans le contexte actuel. D’ici 2050, la population française âgée de plus de 60 ans passera de 17 à 27 millions. Ce changement démographique aura un impact considérable sur les besoins en soins et en hébergement pour les personnes âgées. Les résidents des Ehpad sont de plus en plus âgés et de moins en moins autonomes, nécessitant un accompagnement médico-soignant plus étoffé, mieux formé et mieux rémunéré.
Dans ce contexte, le financement des Ehpad devient un enjeu crucial. En France, la rémunération des personnels soignants est financée par des dotations publiques, qu’il s’agisse d’établissements publics, associatifs ou privés. Mais attention, un écart se crée entre les financements publics alloués et l’évolution des charges. Ce déséquilibre met en péril les structures d’accompagnement du grand âge. Il est donc urgent de passer des paroles aux actes et de mettre en place des mesures fortes, structurelles et équitables.
Le gouvernement a récemment annoncé des mesures financières pour les soignants travaillant la nuit et le week-end dans les Ehpad, ce qui est un pas dans la bonne direction. Cependant, ces mesures ne sont que la pointe de l’iceberg. Le secteur doit recruter et former 300 000 personnels supplémentaires d’ici 2030 pour faire face à la demande croissante. Le taux de postes d’infirmiers vacants dans les Ehpad publics était supérieur à 12 % en juin dernier, ce qui souligne l’urgence de la situation.
Le financement des Ehpad est un problème complexe qui nécessite une approche globale. Il ne s’agit pas seulement de trouver des fonds pour payer les factures d’électricité ou les salaires des employés. Il s’agit de créer une nouvelle dynamique humaine et financière pour répondre aux défis démographiques et sociaux qui se posent à nous. Le temps est venu de passer de la parole aux actes, du diagnostic à l’action, d’un avenir chimérique à une réalité concrète.