La Cour des comptes a récemment tiré la sonnette d’alarme sur l’absence de stratégie nationale en matière de politique du handicap. Ce constat alarmant soulève des questions cruciales sur la capacité de la France à anticiper et à répondre aux besoins croissants des personnes en situation de handicap, notamment celles âgées de plus de 50 ans.
L’augmentation du nombre de personnes en situation de handicap vieillissantes est un phénomène de grande ampleur. Entre 2011 et 2019, le nombre de bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) de plus de 50 ans a grimpé de 55%. Parallèlement, le nombre de personnes accueillies en établissement médico-social a augmenté de 50% entre 2010 et 2018. Cette hausse s’explique en partie par l’amélioration de l’espérance de vie des personnes en situation de handicap, qui progresse plus rapidement que celle de la population générale.
Cependant, cette évolution démographique n’a pas été anticipée par les pouvoirs publics. Les besoins en matière d’accès aux soins et d’accompagnement social et médico-social sont partiellement satisfaits. En conséquence, le vieillissement des personnes en situation de handicap est dégradé par rapport à la population générale. Les ruptures de parcours, notamment en matière d’emploi et de logement, sont fréquentes et symptomatiques des difficultés rencontrées par ces personnes.
La Cour des comptes déplore également le manque de moyens financiers. En 2020, l’enveloppe globale des crédits publics consacrés à la prise en charge des personnes en situation de handicap s’élevait à un peu plus de 51,6 milliards d’euros. Ce montant est jugé insuffisant par la Cour, qui recommande un investissement à hauteur de 1,2 milliard d’euros par an pour améliorer la situation.
Face à cette absence de directives nationales, les Agences Régionales de Santé (ARS) ont dû élaborer leur propre stratégie, souvent avec des moyens limités. Cette dispersion des compétences entre les ARS et les Départements conduit à un effort très inégal selon les régions. Par exemple, seulement 4 289 places pour personnes en situation de handicap vieillissantes sont recensées dans la base Seppia de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), dont 3 074 en foyers d’accueil médicalisé.
Pour remédier à cette situation, la Cour des comptes recommande de conditionner le versement d’une fraction des ressources allouées aux opérateurs au respect de l’obligation de renseignement des systèmes d’information. Elle suggère également la création d’un observatoire national du handicap pour une analyse fine et régulière des différentes données du secteur.
Le Défi de l’Accompagnement à Domicile
Alors que la Cour des comptes met en lumière les lacunes du système français en matière de prise en charge des personnes en situation de handicap vieillissantes, un autre aspect mérite une attention particulière : l’accompagnement à domicile. Selon des sources récentes, près de 90% des personnes handicapées vieillissantes vivent dans un domicile autonome. Cependant, elles ont “significativement moins accès” aux soins que la population générale. Seules 41% de celles qui en font la demande parviennent à bénéficier d’un service d’accompagnement à domicile.
Ce constat est d’autant plus alarmant que l’accompagnement à domicile est souvent la solution privilégiée pour maintenir une certaine qualité de vie. Le manque d’accès aux soins et aux services d’accompagnement à domicile dégrade le vieillissement des personnes en situation de handicap, comparativement à la population générale. Les ruptures de parcours sont également fréquentes, notamment pour les travailleurs en établissement et service d’aide par le travail (Esat) logés en foyer, dont le logement est conditionné par l’emploi. Leur arrivée à la retraite marque souvent la fin de leur accompagnement médico-social.
Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) pourraient jouer un rôle clé dans cette problématique. Les Sages de la rue Cambon recommandent de confier aux MDPH une mission de repérage des personnes handicapées vivant à domicile pour leur proposer, à partir de 50 ans, d’évaluer leurs besoins médico-sociaux liés au vieillissement. Cette démarche proactive pourrait permettre une meilleure anticipation des besoins et une allocation plus efficace des ressources.
En outre, la question du financement se pose avec acuité. L’État est appelé à investir un milliard d’euros par an pour répondre aux besoins de ces personnes. Ce montant pourrait être en partie alloué à la mise en place de services d’accompagnement à domicile plus robustes et plus accessibles.