Le gouvernement français a annoncé un vaste plan de contrôle et d’évaluation des Ehpad privés lucratifs dans le but d’instaurer un « choc de transparence » dans ce secteur décrié. Les Ehpad privés lucratifs ont souvent été critiqués pour leur manque de transparence financière, leur absence de contrôle de la qualité des soins et leur tarification élevée. Dans cet article, nous allons explorer les différentes mesures prises par le gouvernement pour remédier à ces problèmes.
Contrôles inopinés et référentiel national d’évaluation
Pour améliorer la qualité de service et garantir une meilleure prise en charge des résidents d’Hepad, le gouvernement a annoncé la mise en place de contrôles inopinés et d’un référentiel national d’évaluation pour tous les Ehpad de France d’ici deux ans.
Les contrôles inopinés sont des inspections surprise qui seront menées par les Conseils départementaux et l’Agence régionale de santé (ARS) pour vérifier le respect des normes de sécurité et de qualité dans les Ehpad. Cette mesure permettra de détecter plus rapidement les problèmes éventuels et d’y remédier immédiatement pour améliorer la prise en charge des résidents.
En parallèle, le référentiel national d’évaluation permettra de fixer des critères communs à tous les Ehpad pour évaluer la qualité des prestations. Il sera composé de 139 critères standards et 18 critères impératifs. Les standards correspondent aux attentes en matière d’évaluation et les critères impératifs sont des exigences qui, si elles ne sont pas satisfaites, impliquent la mise en place d’actions spécifiques dans la continuité immédiate de la visite.
Le référentiel d’évaluation est basé sur 9 thématiques qui couvrent les trois cibles de l’évaluation : la personne accompagnée, les professionnels et la gouvernance de l’établissement ou du service. Il est structuré en trois chapitres qui permettent d’appréhender la qualité de la prise en charge des résidents dans sa globalité.
Le manuel d’évaluation des pratiques et des organisations repose sur trois méthodes pour évaluer les pratiques et les organisations : les entretiens avec les personnes accompagnées, les membres du conseil de la vie sociale, les professionnels et la gouvernance des ESSMS. Il permettra d’adapter les pratiques de prise en charge et d’améliorer la qualité de vie des résidents.
Renforcer la transparence financière des Ehpad privés lucratifs
Le renforcement de la transparence financière dans la gestion des Ehpad est devenu un enjeu majeur ces derniers temps. Le gouvernement français a pris des mesures législatives et réglementaires en avril 2022 pour prévenir les dérives et abus susceptibles de survenir dans les groupes gestionnaires. Un décret du 28 avril 2022 prévoit la transmission obligatoire d’indicateurs relatifs à la gestion financière, la comptabilité interne, les règles de facturation et les modalités du contrat de séjour des résidents. Le décret fixe également les modalités de contrôle des EHPAD pour garantir la transparence financière dans leur gestion.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a renforcé les exigences de transparence financière des ESSMS et prévoit des sanctions pour garantir la bonne utilisation des fonds publics. Le décret du 28 avril 2022 vise principalement les établissements du secteur privé, mais ces mesures sont valables pour tous les Ehpad. Les dispositions du décret ont pour but d’améliorer la transparence financière et de mieux repérer les détournements de fonds publics.
Le gouvernement a également annoncé un plan de renforcement des contrôles et de la transparence dans les Ehpad, assorti de plusieurs mesures. Le plan est organisé en cinq axes et s’appuie sur le référentiel national d’évaluation des Ehpad. Les contrôles porteront sur la qualité des prestations et l’utilisation des fonds publics, notamment la rémunération des personnels, la qualité des soins et des services proposés, la gestion financière et le respect des droits des résidents. Les établissements seront soumis à des contrôles réguliers, qui pourront être inopinés, pour garantir une transparence financière accrue.
Renforcer le rôle des familles et des soignants

Le plan national sur les Ehpad a également prévu des mesures pour faciliter la médiation et renforcer le rôle des familles et des soignants. Il est ainsi prévu de faciliter l’implication des familles dans le fonctionnement de l’établissement et de renforcer la formation des soignants pour une meilleure prise en charge des résidents. De plus, la revalorisation des soignants du « grand âge » et le renforcement du ratio de personnel au chevet de chaque résident dans les Ehpad sont des mesures proposées par les députés de la commission des affaires sociales.
Le manque d’unités d’hébergement renforcées (UHR), de pôles d’activités et de soins adaptés (PASA) et d’unités de vie protégées (UVP) dans les Ehpad peut être préjudiciable à la prise en charge des plus fragiles. Les inégalités peuvent également se renforcer. Ainsi, il est important de développer ces dispositifs pour offrir une prise en charge médicale adaptée.
Les témoignages de familles de résidents en Ehpad montrent que le Conseil de vie sociale (CVS) joue un rôle essentiel dans le processus d’amélioration continue. Il est donc important de faciliter son fonctionnement pour permettre une meilleure implication des familles.
Encadrer les revenus des dirigeants des groupes d’Ehpad privés lucratifs
Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sont souvent gérés par des groupes privés à but lucratif, qui peuvent être multi-gestionnaires. Cependant, ces groupes privés ont été critiqués pour leur manque de transparence et pour les revenus élevés de leurs dirigeants. Plusieurs propositions ont été faites pour encadrer les revenus des dirigeants des groupes privés lucratifs d’Ehpad multi-gestionnaires.
La commission des affaires sociales du Sénat a proposé plusieurs mesures pour améliorer la transparence et le contrôle de ces groupes. L’une de ces mesures consiste à suspendre toute nouvelle habilitation ou tout nouvel agrément de structures commerciales, afin d’encadrer la lucrativité du secteur du grand âge. Les ARS et les départements doivent être informés du changement de propriétaire et les autorisations renouvelées.
La commission des affaires sociales du Sénat a également proposé de conclure une convention pluriannuelle d’objectifs entre la CNSA et chaque groupe privé lucratif multi-gestionnaire d’Ehpad, et de fixer un taux maximum de prélèvement au titre des frais de siège. Cela permettrait de clarifier les règles d’imputation des dépenses de personnel entre les différentes sections tarifaires.
Selon les données de la CNSA, la section hébergement représente entre 46,5 % et 53,8 % des recettes perçues par les établissements, la section soins entre 31,5 % et 38,5 % et la section dépendance entre 14,4 % et 15, 7 %. Pour une chambre seule, le prix de journée médian était en 2017 de 84,18 euros dans le secteur commercial, contre 59,96 euros dans le secteur non lucratif. Cela ne se retrouve pas dans les taux d’encadrement, qui sont nettement supérieurs dans les établissements non lucratifs.
Le gouvernement français a mis en place un plan ambitieux pour instaurer un « choc de transparence » dans les Ehpad privés lucratifs. Les différentes mesures prises devraient permettre de garantir une meilleure qualité de soins et une plus grande transparence financière dans ce secteur, tout en renforçant le rôle des familles et des soignants. L'objectif est de garantir aux résidents des Ehpad privés lucratifs un environnement plus sûr et plus transparent, tout en réduisant les abus et les tarifs excessifs. Ces mesures sont donc les bienvenues pour améliorer le fonctionnement de ces établissements et assurer une meilleure qualité de vie pour les résidents.